Bien à Bienne : Théatre

Théatre

06/01/2012 | Théatre



Sur mes genoux, petite Chuchutte suçotte son ptit poussou.
Ou. si vous préférez, ma petite fille s'endors.. je la regarde avec tout l'amour dont je dispose.
elle est si petite. Entre mon pouce et mon index, il y a la longueur de son genoux à la cheville.
C'est pas beaucoup pour quelqu'un qui prends tellement de place.
Sidney grandit pourtant et elle essaie de s'exprimer. Sauf qu'a 10 mois, on est toujours un peu limité de ce côté là!
Alors, elle chouine. Traduction, elle manifeste sa désaprobation par de petits sons ennervants.
Enfin, pas là, maintenant, elle dors.
Je suis fatiguée aussi.
Mieux moralement, mais épuisée physiquement.
Ce matin j'avais retrouvé quelques forces et du coup, j'ai ressortit ma trotinette pour rendre visite à ma mère qui habite à l'autre bout de la ville.
Et puis, je suis rentrée. Mais bêtement, j'avais oublié mon sac là-bas.
Donc, j'y suis retournée.
Mais  pour le trajet du retour, j'ai pris le bus.
Lorsqu'il s'est arrêté vers la bibliothèque, tout les regards se sont tourné vers la femme qui entrait à l'intérieur.
Tout son visage semblait avoir servi de punching ball.
Je ne la connais pas cette femme, mais elle fait partie, avec son compagnon, des gens que je croise souvent.
Je me souvient encore, la première fois que je les ai vu ensemble, jeune couple fraichement amoureux.
Elle avait une classe certaine qui contrastait avec le bleu de travail de "Lui".
Main dans la main, heureux.
La, elle rentre dans le bus, et lui la suit.
Enfin, il reste un instant de plus sur le trottoir, les yeux fermés, et la porte du bus se referme sur ses bras qu'il venait de tendre en avant.
Je presse sur le bouton pour le liberer.
Elle est déjà assise.
Lui va payer le tiquet. 
Puis il la rejoint.
Ils sont quelques sièges derrière moi, alors je ne les vois pas.
Mais je les entends.
Ils poussent des grognements de bêtes sauvages.
Tout le bus les regarde.
Elle avec ses yeux,ses joues, son menton et son front marqué par les coups.
Lui avec ses yeux toujours fermés.
Elle n'a plus rien de classe.
Lui est en bleu de travail , mais ses mains blanches sont gonflées par la cortisone.
Enfin, je suppose.
Je ne peux que supposer, je ne les connais pas.
Le seul fait de prendre le bus les mets sous le jugements des autres.
Tout le monde les regarde et pense pareil.
En face de moi, un couple d'italiens cinquantenaires s'indigne du spectacle.
Les grognements de bêtes s'intensifient.

Ils savent qu'on les regarde, comme au zoo, alors, logiquement, ils "font" les animaux.
C'est ce qui les réunis, dans l'instant, nos regards sur eux, notre jugement.
Est-ce qu'il la frappe?
Est-ce qu'elle lui a pardonné ?
C'est si terrible que ça me hante encore.
Un après-drame dont tout le bus est témoin.
C'est si impressionnant ce visage tuméfié.
On ne peut que s'imaginer la violence qui s'est déchainé contre elle.
C'est aussi terrible à dire, mais certaines femmes perturbées acceptent cette violence comme une preuve d'amour et s'en vantent après.
"Oh, mon homme, il est si fort!" . Personne d'autre qu'elle ne le comprends.
On arrive à la gare. Un homme en chaise roulante attends  à son tour devant le bus.
Le couple descends sans un regard.
Le chauffeur descends pour aider le monsieur handicapé.
Celui -ci salue une petite fille qui le regarde.
"Sali Fraulein" dit-il joyeusement.
Et cette joie éclaire tout le bus.

Voilà mon arrêt. Je me dis que le bus est un théâtre, le théâtre de la vie.

22:36 Publié dans histoire vraie | Tags : théâtre, bus, vie | Lien permanent | Commentaires (1) | Trackbacks (0) |

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Commentaires

une de mes amies a réussi à se libérer de celui qui la battait et terrorisait les enfants;
ça a pris des années

des années pour prendre conscience et se libérer ;

et faire appliquer son choix , ça a été le plus long

les femmes ne reçoivent pas toujours l'aide dont elles ont besoin

Écrit par : clara | 06/01/2012

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