21/01/2011 | Accouchemment à la maison

11 heures du matin.
Dans le salon, les restes de gâteau témoignent de la fête nocturne.
C'est nous la philosophie est de profiter de chaques seconde de la vie. Et la tradition veut, qu'a partir de minuit 1, l'anniversaire commence.
Même si elle est née à 18 heures 30.
Comment oublier?
La scène :
Chambrette qui sert de bureau chez mes parents, transformée en salle d'accouchement.
Matelas par terre, suivant ma volonté.
Semi obscurité pour ne pas éblouir bébé, et température caniculaire pour un mois de janvier, afin de coller au plus près aux conditions intra-utérines.
Aussi chaud dehors que dedans...
Tout est prêt pour accueillir la merveille des merveilles, après 10 mois de gestation, il était temps.
Chaque jour, avec les contrôles, les doutes, les appréhensions, les questions liées à cet était prolongé : va-t-elle enfin se décider à sortir?
On plaisante: elle se sent bien.. elle reste au chaud...
Ma sge femme me rassure : je n'en connait pas un seul qui soit resté dedans... ils finissent tous par sortir.
Alors, c'est aujourdd'hui, sans aucun doute.
Les contractions ont débuté à minuit, pour se poursuivre toute la nuit.
Et là, allongée sur mon matelas, débute un calvaire qui durera 18 heures.
Devant, derrière partout la douleur s'installle , apprait, s'intensifie, et ne se calme que pour repartir de plus belle.
Mon corps est livré à des millions d'années d'habitude terrestre. L'humanité.
Ca veut sortir et CA FAIT MAL. TRES MAL.
e suis dans un état segond mais auprès de moi, les femmes se relaient pour me soutenir.
La Sage, et les autres, ma mère dont je ne supporte plus le visage inquiet, même un quart de seconde. Ma soeur, ma belle-soeur qui
se tiennent prête pour l'instant crucial. Elles sont choisies soigneusement parmi toutes pour me servir d'étrier, je veux m'appuyer
sur elles au moment ou les ultimes poussées apporteront la délivrance.
On chante. "Aaaaaaaaaaaah".. c'est un truc pour faire sortir la douleur.
C'est presque ridicule ces harmonies, mais ça aide.. "aaaaaaa" "ooooooOOOOO"!!!
J'ai envie de hurler, mais je me retiens.
L'horrible phrase de ma cousine me revient : "Tu gueulera pas comme une portugaise".
Et alors? pourquoi pas ? Je suis portuguaise si je veux et j'ai envie de gueuler!
Mon cerveau est pris dans un état d'hyper-conscience qui envahit tout l'espace.
Je suis tout.
Je vais accomplir le devoir sacré sans qui l'humanité ne serait pas. Enfanter.
Mais pourquoi je dois souffrir autant.
et pourtant, je refuse la piqure qui apaiserait cette souffrance.
Je veux le faire "old school". A l'ancienne, ne rien manquer. On ne sait jamais.
Ma veux faire dans les règles, sans tricher.
Et puis... ma sage-femme s'en va, une autre de ses patientes acouche.
Elle m'assure qu'elle reviendra.
Je me traine entre la salle de   bain et la chambre.
Rien ne me soulage.
Et si elle ne revenait pas à temps?
elle revient, je suis par terre dans la salle de bain et le travail commence.
Mais ça ne va pas.
Un mois de plus, la tête est beaucoup trop grande.
Ma soeur qui tient le miroir manque de s'évanouir.
Ma nièce, toute petite, dont c'est l'anniversaire quitte la chambre.
On va couper.
Suzi saisit le scalpel et m'assure que je ne sentirai rien. Elle sait quand il faut faire, pendant ou après la contraction, je ne sais plus.
Mais au moment précis ou elle incise, sans anesthésie, je change d'état et "ziiick" elle m'ouvre et en même temps que le sang gicle, je hurle.
Après, ça va vite.
elle est là!!!
La tête apparait, il faut pousser.
j'ai l'impression pas très gracieuse de devoir sortir une crotte géante.
"Stosse" me dit la sage-femme en suisse-allemand.
"Pousse" traduit ma belle.soeur".
Et je m'execute, le temps de comprendre, avec un décalage.
Ma soeur tremble comme une feuille.
Ma belle-soeur est un roc.
Je compense avec les jambes pour ne pas me déséquilibrer.
Tellement que mes muscles me lâcheront et que ne ne pourrais plus marcher pendant une semaine.
Et....
"Pfouiiiiiiiiiiit".
Elle sort.
Enfin.
Un quart de seconde et un machin tout brun et sanguinolent arrive sur mon ventre.
Je n'ai plus mal du tout.
Je regarde autour de moi et je vois les visages dévastées des femmes qui m'entourent.
Moi je suis sereine.
J'ai accompli mon devoir sacré et cette vie qui palpite dans mes bras est à moi.
Ma fille.
Hélène.
Au moment crucial, au loin la télé entame le générique de "Top Model". Talatata tatatata... Il est 18h30.
Dans la cuisine, tandis que la doctoresse arrivée en renfort me recouds, mon père reçoit des mains de Suzi le précieux cadeau qui changera sa vie aussi.
Il est grand-père. Profondement, encore plus que tout ce qu'il a été jusqu'à présent.
Il y a plein de monde dans l'appartement.
Je voulais que ma fille se sente accueillie parmi les siens.
Elle est immense, 4 kilos 500, 57 cm.
Elle est belle, d'une beauté quasi extra-terrestre, avec les yeux immense qui remontent un peu.
Et cette couleur de peau étrange, violette.
Zwaetschke, dit Suzi. "Pruneau".
Pour moi, c'est ma princesse.
Arrive le parrain Michel et le copain Manu.
Ils s'installent devant son couffin et l'admirent  pendant une heure.
Elle est extraordinairement belle.
Ma récompense.

19 ans plus tard, elle sort, aussi, mais de sa chambre. Avec son ventre en avant et ma future.petite-fille dedans.
La vie c'est la continuité, la changement dans la continuité.
Elle, elle ira  l'hopital.
Ca me rassure.
La jeune femme que j'étais et la grand-mère que je suis n'ont plus grand chose à voir.
Ce qui ne change pas, à la base, c'est l'amour que j'ai pour mes enfants.
C'est ma Vie.

12:04 Publié dans histoire vraie | Tags : accouchement, maison, fille | Lien permanent | Commentaires (3) | Trackbacks (0) |